J'ai failli tout envoyer balader ses derniers jours. Ne sachant plus à quoi ni à qui me fier, et surtout pas à moi-même, j'allais encore choisir la solution de facilité qui me procurerait le moins de travail: la fuite en avant. Oui, je doute. Je doute d'être fait pour cette magnifique philosophie qu'est le bouddhisme. Je doute de mériter tous ces enseignements qui me parlent tellement mais qui d'un autre côté me font peur.
Peur de me retrouver en tête à tête avec moi. Non pas que l'on ne s'entende pas mais cela a plutôt été houleux entre nous ses dernières années. J'ai d'ailleurs cessé de pratiquer toute forme de méditation pour l'instant. De toute manière, je n'y arrive pas. Impossible de me concentrer sur autre chose que mes petits problèmes personnels. Moi, toujours moi et encore re-moi. Mon égocentrisme ressort vaille que vaille et il me faut le combattre.
Mais peut-être finalement est-ce ça la solution. Me retrouver face à moi-même et enfin annihiler toutes ses douleurs que je transporte depuis des années. Parfois, je me demande si cela vaut vraiment la peine d’accomplir un tel travail. Les maux sont-ils si insurmontables qu'il me faudrait les combattre ?
Je suis confu en ce mment. Je passe d'un état d'esprit à un autre sans savoir plus trop quoi penser. Ce que je sais, c'est que je n'ai jamais été aussi loin dans cette démarche me permettant d'apprendre à me connaître et surtout, d'en accepter les conséquences. Il ne me reste donc qu'à poursuivre, qu'à m'accrocher....
Surtout, tenir bon...
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis une semaine. Une entrevue avec le lama du centre m’avait permis de voir plus clair par rapport au chemin que je m’étais tracé. Relativiser, ne pas accorder d’importance à ce qui ne l’est finalement pas, vivre l’instant sans se poser trop de questions. J’étais ressorti revigoré de cet entretien. Optimiste comme un taureau prêt à ruer, je m’étais promis de donner une nouvelle dimension à ma quête.
Pourtant…
Ce week-end, je l’attendais depuis longtemps. Retraite et apprentissage de la méditation en compagnie d’autres pratiquants. A peine arrivé sur place que me voilà au beau milieu d’une conversation portant sur l’enseignement des divinités et autres techniques méditatives existantes. En un instant, me voilà largué, à la masse, dans le fossé. Respirer, reprendre de l’air car le premier cours allait déjà commencer. Voilà que je me retrouve dans l’arène, mais pas du bon côté. J’enfile ma tenue de gladiateur, impuissant face à ce qui m’entoure. Ne disposant pas des bonnes « armes » pour me défendre, je me suis senti comme glisser. Pas à ma place, pas au bon endroit comme si je venais d’atterrir sur une autre planète, mais pas la mienne.
Sortir et le plus rapidement possible. Fuir cet endroit. Rentrer chez moi. Penser à autre chose. Je n’étais pas prêt. Peut-être étais-ce trop tôt. Peut-être avais-je cru que cette décision de me retirer deux jours serait la bonne. Peut-être avais-je réfléchi trop vite comme d’habitude. Peut-être, peut-être…
J’ai besoin de prendre un peu de recul. Enfin, je crois. Une journée est passée et j’y pense déjà. Comme si j’avais pris congé d’un être auquel je tenais plus que tout. Déjà envie de le retrouver et de le serrer tout contre moi.
Et si je suivais le conseil de cet ami. Rien n’a d’importance, rien n’est grave. Ne te pose pas tant de question car de réponse, tu te rendras vite compte qu’il n’y en a pas…
Et si…
Mes séances de méditation se passent de mieux en mieux. Depuis que j’ai reçu de précieux conseils d’un des membres de la Sangha, je suis parvenu à franchir un palier supérieur auquel je n’escomptais pas de sitôt. Mais comme me dit mon « ami » : ne reste pas sur cette réussite, profite de l’instant et passe directement à autre chose sinon cela pourrait te jouer des mauvais tours et ton ego s’en verrait valorisé. Je vais suivre ses conseils. Il pratique quand même depuis 15 années alors que moi je n’en suis encore qu’aux prémices.
Depuis peu, j’ai décidé d’allier les enseignements du Bouddha à ma vie de tous les jours. Ce n'est pas tout de lire et de méditer, le Dharma se pratique, à n'importe quel moment, dans n'importe quel lieu, à n'importe quelle occasion. Sagesse et Amour font souvent bon ménage dans le Bouddhisme...
J'ai participé ce samedi à une initiation au bouddhisme. Fort bien donné d'ailleurs. On a eu droit aux origines du bouddhisme avec en guise de hors d'oeuvre, la vie du Prince Siddhârta et de sa prise de conscience de la souffrance du monde qui finit par le mener vers l'éveil. Ensuite, un exposé sur les relations entre le Bouddhisme et l'occident nous a été prodigué. On y apprend entre autres que le Bouddhisme interpelle de plus en plus et ce depuis les guerres de Corée et du Vietnam. De nombreux soldats ont en effet ramené dans leurs bages le message du Bouddha. Cela me laisse penser que la violence peut parfois engendre quelque chose de constructif. Enfin, Lama Tzeupa nous a donné les clefs nous permettant d'entrevoir la pratique de la méditation d'une manière pragmatique.
Tout cela ne m'a laissé que de bonnes impressions. Pourtant, depuis, mon esprit n'en est que plus embrumé. Si le message de Bouddha me parle et réussi à ouvrir mon coeur sur l'extérieur pour la première fois, il n'en reste pas moins que je me pose la question quant au chemin à emprunter. La lecture des enseignements ? La méditation est-elle judicieuse lorsqu'on débute ? La prise de refuge, est-elle opportune ou faut-il mieux encore patienter ?
J'ai besoin de réponses. Même si je reste persuadé qu'elles sont en moi, je me demande si une aide extérieure ne me serait pas d'un grand secours...
Quoiqu'il en soit, mon enseignement a bel et bien commencé...
"Ceci est la deuxième méthode, mes chers amis:"
Si une personne ne dit pas de paroles aimables mais agit avec bonté, et qu’elle nous met en colère, comme nous sommes sages, nous devrions savoir comment méditer pour mettre fin à notre irritation ou à notre colère.
"Mes chers frères, disons que non loin du village se trouve un lac profond. Mais sa surface est couverte d’algues et d’herbes. A ce moment, une personne torturée par la faim, la soif et la chaleur s’approche du lac. Elle se déshabille, pose ses vêtements au bord du lac, plonge dans l’eau, écarte les algues et les herbes de ses deux bras, se désaltère et savoure la baignade."
"Chers amis, il en est ainsi quand quelqu’un ne dit pas de paroles aimables mais agit avec bonté. Ne prêtons pas attention à ses paroles mais soyons attentifs uniquement à ses actes aimables afin de mettre fin à notre colère. Un sage devrait pratiquer ainsi."
Madhyama Agama 25
Le grand jour est enfin arrivé. Pour la première fois, j’allais pouvoir pénétrer dans l’antre du bouddhisme. Anxieux, je me suis approché du lieu. La porte entre ouverte, je suis entré sans faire de bruit. La même personne que l’autre jour m’a accueilli et m’as directement dirigé vers quelqu’un susceptible de m’apporter son soutien et son aide pour cette première approche. Un guide en quelque sorte.
Ce dernier m’a fait partager son expérience de la pratique en m’informant sur certains points à respecter et à suivre durant la séance de méditation à laquelle j’allais participer. Il m’a entretenu des textes qui allaient êtres récités, de l’histoire du Bouddha auquel la méditation du jour était dédiée, quelle en était son histoire, etc.
J’ai ensuite ôté mes chaussures, passé les portes du temple pour me retrouver en face de celui qui occupe mes pensées depuis maintenant quelques semaines. Je me suis assis, regardé autour de moi. J’ai vu toutes ces personnes se prosterner, emprunte d’une compassion sans bornes. Je me suis laissé porter par l’ambiance du lieu.
Lama est alors entré. Il s’est installé et a commencé à réciter les mantras dédié à Tchenrezi (Bouddha de la Compassion). Je me suis laissé bercer par sa voix plus que par la signification des paroles. Après tout, je ne suis encore qu’un novice et il me faudra certainement un peu de temps pour assimiler les enseignements. J’y travaillerai, c’est sûr. Je sais que j’ai fait le choix et rien que cette perspective a le pouvoir de m’emplir de bonheur.
Systématiquement, lorsque l'occasion m'est offerte de me sentir bien avec moi-même, je la saborde. Jeudi dernier, j'ai enfin osé franchir cette grande porte rouge devant laquelle je passais inlassablement sans oser y entrer. Cette fois-ci, j'ai sonné et il n'a fallu que quelques secondes pour que quelqu'un ouvre pour l'accueillir.
Dès cet instant, j'ai compris que j'étais le bienvenu. La dame emprunte d'un altruisme démesuré m'a fait visiter les lieux, prenant le temps de m'expliquer l'origine de chaque pierre. Elle s'est ensuite assise avec moi. Je lui ai ouvert mon coeur comme on le fait avec quelqu'un en qui l’on témoigne une confiance aveugle. Elle m'a compris. Enfin, je pense. Je lui ai demandé des renseignements sur leurs activités et plus précisément sur celle qui aurait lieu ce mercredi soir.
Elle m'a parlé du chemin qu'elle avait parcouru depuis 4 ans. Des luttes intestines qui la taraudaient chaque jour. Je l'ai entretenue des miennes. Nous nous sommes compris comme deux personnes qui d'un regard savent ce que l'autre pense exactement. J'angoisse à l'idée de les retrouver tous ce soir. Pourtant, je sais qu'au plus profond de moi je dois le faire. Que ça ne m'en sera que bénéfique. Moi aussi, j'ai ce besoin de bien-être. Moi aussi, j'ai envie de le rencontrer. Alors...
Ainsi ai-je entendu dire le Bouddha, un jour qu’il demeurait au monastère d’Anathapindika, dans le parc Jeta, non loin de Sravasti. Ce jour-là, le Vénérable Sariputta dit aux moines:
"Chers amis, aujourd’hui je voudrais vous faire partager les cinq méthodes pour mettre fin à la colère et à la haine. Je vous prie de m’écouter attentivement et de méditer sur ce que je vais vous dire."
Les moines consentirent à l‘écouter attentivement.
"Quelles sont ces cinq méthodes pour mettre fin à la colère et à la haine?" demanda le Vénérable Sariputta.
"Voici la première méthode, chers amis:"
"Si les actions d’une personne ne sont pas aimables mais que ses paroles le sont et qu’elle nous met en colère, parce que nous sommes sages, nous devrions savoir comment méditer pour mettre fin à notre irritation ou à notre colère."
"Chers amis, imaginons un moine qui pratique l’ascétisme et aime se vêtir d’une robe faite de morceaux de tissu. Un jour, il passe devant un dépotoir dégoûtant avec des excréments, de l’urine, du pus et d’autres saletés et il voit un morceau de tissu encore intact. De sa main gauche, il ramasse le tissu et de sa main droite, il l’étend. En voyant que le morceau de tissu n’est pas encore troué ni sali par les excréments, l‘urine, le pus et d’autres saletés, il le plie aussitôt, le garde et le rapporte chez lui pour le laver puis le coudre avec d’autres morceaux afin de faire une robe."
"Chers amis, de la même manière, quand une personne n’agit pas avec bonté mais prononce encore des paroles aimables, ne prêtons pas attention à ses actes. Par contre, pensons uniquement à ses paroles afin de pouvoir mettre fin à notre irritation ou à notre colère. Un sage devrait pratiquer ainsi."
Madhyama Agama 25